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Famille d’accueil : un espace thérapeutique

Auteurs : Maurice LE BECHEC, président de l’UNAFA - Anne-Thérèse PAISTEL, psychologue, formatrice

Historiquement, l’utilisation de l’espace familial comme espace d’accueil de la maladie mentale, puis du handicap social plus récemment, correspondait à une préoccupation hôtelière plutôt que thérapeutique. Or, il s’est avéré que l’institution familiale, sollicitée comme espace d’accueil, offrait un certain nombre d’avantages pouvant favoriser l’émergence d’un processus thérapeutique. Avantages qui tiennent autant au cadre d’évolution de la famille qu’aux relations que le patient peut y trouver.

Que recherche-t-on, en effet, dans le placement familial ? Quelle est la portée thérapeutique de cet élément de socalisation présent dans une dynamique familiale ? Au-delà de la production de soins, d’attentions, il faut tenir compte de la dimension des mécanismes psychiques qui sont mis à l’œuvre.

Ce qui est visé dans cette "fonction d’accueil familial Accueil familial Alternative au maintien à domicile et au placement en établissement spécialisé : les personnes handicapées ou âgées sont prises en charge au domicile de particuliers agréés et contrôlés par les conseils départementaux (ou par des établissements de santé mentale). L’accueil peut être permanent (contrat conclu pour une durée indéterminée) ou temporaire, à temps complet (24h/24) ou à temps partiel (exemple : accueil de jour), ou séquentiel (exemple : un weekend tous les mois). ", c’est la répartition de l’économie, de l’investissement dans un type de relation à objet ou à sujet, et la place que la maladie y occupe. Ce qui est en cause est donc bien du thérapeutique, et même s’il s’avère difficile de le définir, c’est du sujet qu’il s’agit et de son émergence dans une reconstruction d’une histoire qui l’aide à la structuration de son imaginaire et qui le reconnaisse comme sujet parlé, parlant, désirant.

Le cadre que représente la famille d’accueil famille d'accueil Terme désuet et imprécis remplacé, depuis 2002, pour l’accueil d’adultes âgés ou handicapés, par l’appellation accueillant familial. Saisir "famille d’accueil" sur un moteur de recherche conduit à des sites traitant de placements d’enfants et/ou d’animaux maltraités : cherchez plutôt "accueil familial" ou "accueillants familiaux" ! peut alors constituer un contenant capable, grâce aux résistances, à l’identité, aux mécanismes de défense de chacun de ses membres, d’offrir à l’accueilli la possibilité d’exister sans trop de risques et d’y développer des mécanismes de "colmatage" d’angoisse, de sérénité, puis de cicatrisation. Les familles d’accueil offrent des potentialités multiples, car, petits groupes vivants, naturels, elles sont bâties sur un modèle infiltré de coutumes, de règles familiales, qui se défendent contre toute intrusion et plus encore contre tout système paralogique.

Le rôle de l’institution peut et doit matérialiser ce "contenant" en distribuant les rôles d’accueilli et d’accueillant. Mais il doit replacer ceci dans une dimension institutionnelle et thérapeutique en établissant un cadre de pensée ou la dialectique famille d’accueil-équipe peut alors se nouer et produire du sens, permettant au fonctionnement psychique de l’accueilli d’exister, d’évoluer.

Cadre de pensée, car dans toute conception du soin, la notion de cadre au sens de contenant apparaît essentielle. Ce n’est pas parce que des bornes et des balises existent que la personne accueillie pourra se situer, se percevoir en référence à l’Autre, et dont exister en tant qu’individualité. Cadre de pensée aussi dans une dimension spatiale. Il s’agit d’offrir à l’être en difficultés, dont les liens le reliant à la raison ont cédé, un espace où ses facultés relationnelles et affectives puissent se développer sans risque.

On peut se demander si une famille, ayant à appréhender et à traiter des situations à dimension thérapeutique aussi complexes que celles exigées dans ce cadre de pensée, peut constituer un cadre, un contenant capable d’assumer de telles responsabilités. N’est-ce pas trop demander à une famille ? En fait, c’est avec les résistances, l’identité, les personnalités, les mécanismes de défense de chacun des membres de la famille que l’institution va avoir à créer un espace thérapeutique pour la personne accueillie, à travailler dans la relation avec l’Autre souffrant.

La famille d’accueil va être le réceptacle de sentiments intenses, le lieu de projection, le support de phénomènes de transfert. Un lieu, un réservoir où la personne accueillie va puiser les éléments nécessaires à son évolution, à sa stabilisation. C’est ce qui peut expliquer l’immense dimension psychothérapeutique du processus du placement familial.

Voilà en quoi le travail d’accueil familial peut être qualifié de thérapeutique, grâce à un état de sécurité de base établi autour de la famille d’accueil, en créant un espace de transition. C’est un peu comme un modèle de "poupées gigognes", car les pensées de la personne accueillie en difficulté vont être englobées dans un ensemble plus vaste le liant à la famille d’accueil ; l’ensemble étant lui-même contenu dans un ensemble qui le dépasse, le reliant au reste de l’institution. C’est une sorte de réseau, plus ou moins serré, où l’on a le sentiment que quelque chose peut enfin se tisser.

Dans le contexte actuel, l’espace thérapeutique défini ci-dessus convient également à tous les destructurés sociaux, asociaux, et carencés affectifs. Si le placement thérapeutique s’appliquait aux malades mentaux jusqu’à une période récente, on ne peut plus ignorer le handicap social, pour lequel la frontière entre le placement familial thérapeutique et le placement familial social est pratiquement effacée. Les attitudes, les comportements de la famille d’accueil permettent aujourd’hui d’obtenir d’excellents résultats auprès de cette nouvelle catégorie de "patients".